La Grenouille a découvert un intéressant document permettant de faire la connaissance d’un inventeur courchois du XIXe siècle qui mit au point un appareil original, et sans doute fort utile pour les propriétaires de chevaux de l’époque…
Louis Deguenant est né le 22 mars 1829 à Bélâbre dans l’Indre et
épouse Élise Honorine Jacquot (1832-1890) le 22 juin 1853 à Cour- Cheverny. On
trouve sa trace dans les états du recensement de 1872, demeurant dans le bourg,
profession serrurier, mais sans qu’on puisse déterminer le lieu exact de son
habitation.
Un brevet de 1883Le document dont nous avons eu connaissance est un brevet, qui nous
indique : « Sur un procès-verbal dressé le 1er septembre 1883, à 2 heures 45
minutes, au Secrétariat général de la Préfecture du département de Loir-et-Cher
et constatant le dépôt fait par le Sieur Deguenant d’une demande de brevet d’invention
de quinze années, pour une boîte automatique portative, donnant l’eau et l’avoine
à un cheval à l’heure que l’on désire sans être obligé de se déranger,
Arrêté ce qui suit : Article premier. Il est délivré au Sieur
Deguenant Louis, serrurier mécanicien à Cour-Cheverny (Loir-et- Cher), sans
examen préalable, à ses risques et périls, et sans garantie, soit de la
réalité, de la nouveauté ou du mérite de l’invention, soit de la fidélité ou de
l’exactitude de la description, un brevet d’invention de quinze années, qui ont
commencé à courir le 1er septembre 1883, pour une boîte automatique …/… ».
Quelques explications
Accompagnant le brevet, un document manuscrit de deux pages rédigé
par Louis Deguenant, complété par 4 dessins, nous permet de comprendre
l’utilité et le fonctionnement de l’appareil…« À l’heure voulue, l’eau tombe dans une auge destinée à la recevoir
et douze minutes après l’avoine. Cette boîte est portative, elle peut être
placée avec facilité soit dans le râtelier ou accrochée aux barreaux par une
courroie ou une chaînette fixée à la boîte à cet effet, et lorsque la boîte est
garnie de son eau et d’avoine, et que l’on a fixé l’heure de la sortie et fermé
à clef, aucune personne étrangère ne peut rien changer.
La grandeur et la forme de cette boîte n’ont rien de précis ; elle
peut être modifiée selon le désir de l’acheteur ».
Suivent ensuite les références aux croquis accompagnant le brevet,
dont nous reproduisons quelques-unes ci-dessous :
« A. planche du devant de la boîte sur laquelle sont montées
toutes les pièces.
B. platine de cuivre sur laquelle est monté le mouvement
et les deux leviers D.
C. molette tournante avec la petite roue F qui porte
les deux goujons 2 et qui porte la petite aiguille u ; les trois pièces sont
obligées de tourner ensemble.
D. levier ouvert pour l’eau.
F. coulisse prise dans la tête du levier D et glissant
dans les rainures R.
DD. levier de l’avoine fermé
FF. coulisses fonctionnant comme la précédente.
…/… »
« Je m’engage en outre à faire subir à cette invention toutes les
modifications que l’on pourra désirer.
Fait en double exemplaire à Cour-Cheverny le cinq août mil huit cent
quatre-vingt trois.
L. Deguenant »
« Ministère du Commerce - Brevet d’Invention sans garantie du
Gouvernement (1) - Durée 15 ans – n° 157 324
Pour le Ministre du Commerce, le Chef de Division, C. Nicole ».
Une carrière internationale
Il semble que cette invention ait connu un certain succès, puisque
l’appareil a été breveté ensuite en Belgique le 25 mars 1884 (n°64 424), en Allemagne
(n° 29 140) et en Angleterre le 28 mars 1884 (n°5 622) et aux Etats Unis le 19
novembre 1885 (n° 354 308).
Un ingénieux système
Nous avons pu nous procurer le brevet américain, qui est imprimé et
accompagné de remarquables dessins de l’appareil, qui permettent de comprendre
encore mieux le mécanisme conçu par notre génial inventeur… Il est en fait
conçu à partir d’une horloge, qui permet, à l’heure voulue, l’ouverture d’une trappe
pour l’avoine et douze minutes plus tard le relevage d’un levier appuyant sur
un tuyau en caoutchouc pour libérer l’eau : à manger et à boire….
Avis de recherche…
Louis Deguenant s’éteint le 2 juin 1894 à Cour-Cheverny, à l’âge de 65
ans, ne nous laissant comme trace que les documents évoqués ici. Nous n’avons
trouvé nulle part son appareil dans les granges que nous avons visitées dans la
commune, mais nos recherches ne font que commencer…
P. L.
(1) La fameuse mention « SGDG », qu’on retrouve sur bon nombre
d’anciens appareils, a été établie par la loi de 1844 et dégage l'État de toute
responsabilité sur le bon fonctionnement effectif du dispositif breveté. Elle
n’existe plus en France depuis 1968 (Wikipédia). La Grenouille n°66 - janvier 2025
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