Créée en même temps que la clinique dans les années 50
et gérée à ses débuts par les parents, personnels de La Borde, la garderie s’est
transformée au début des années 70 sous l’impulsion de Françoise Dolto (2) que Jean Oury avait fait venir
dans l’établissement. Celle-ci a conseillé d’installer la garderie dans un lieu
séparé de la clinique, ce qui fut fait, et inculqué un mode de fonctionnement nouveau,
confié à du personnel qualifié. Et les gardiennes (c’est comme cela qu’on les
désigne à La Borde) successives se sont ensuite transmis, et jusqu’à nos jours,
les « clés » de la garderie inspirées par Dolto et dont les témoignages recueillis
nous donnent un aperçu…
Réservée aux enfants du personnel de la clinique, la garderie
a gravé pour longtemps des souvenirs heureux dans les mémoires… On peut même
affirmer que la fréquentation de ce lieu a, pour la plupart d’entre eux, à des degrés
divers, influencé leur caractère, ou leur vie personnelle, familiale ou
sociale. Nous tentons ici de transmettre au lecteur tout le plaisir que nous
avons eu à recueillir le témoignage d’une vingtaine de personnes et à partager avec
eux des moments de bonheur lointains, mais très présents dans les mémoires…
Pour beaucoup d’entre eux, c’est de l’âge de un an
(voire moins…) jusqu’à 14 ou 15 ans qu’ils ont fréquenté la garderie ; pendant
le temps de travail des parents lorsqu’ils étaient tout petits, puis le
mercredi (et les week-ends de temps à autre) lorsque le moment de l’école fut
venu. Toutes sortes de souvenirs remontent à la surface quand on évoque la
garderie : des lieux, des bruits, des odeurs, des personnages, et surtout des
activités, multiples, variées et riches en sensations inoubliables…
Un lieu particulier Souvent cités, les arbres au
milieu de la garderie : celle-ci avait en effet été construite autour de deux
chênes dont on avait gardé les troncs, trônant au milieu de la pièce
principale. « Présents là depuis si longtemps que leur écorce était patinée…,
comme vernie ».
Également inoubliable : « Un tout petit espace dans
les combles, accessible seulement aux enfants car trop petit pour qu’un adulte
puisse s’y tenir aisément, où nous pouvions nous cacher et inventer de nouveaux
jeux, voire des jeux interdits… », tout comme la grande baie vitrée donnant sur la mare
« où nous pouvions compter
les canards et les canetons, les cygnes et même les ragondins » et aussi « le théâtre [une petite
estrade], la bibliothèque, le coin lecture, le tourne-disques, la baignoire dans
le dortoir, le piano dans la salle de spectacle au château, les jouets
multiples dont nous ne disposions pas à la maison », « Des petites tables, des
petites chaises, tout était miniature, à l’échelle des enfants ».
Et le « Fort Gardoche », « une forteresse construite
en bois par nous-mêmes avec l’aide des parents, et le lieu d’innombrables épopées
». Ce fort a hélas aujourd’hui
disparu, victime des normes car trop vétuste, au grand dam des enfants pour qui
il représentait un véritable sanctuaire, tout comme « l’arbre à enfants » dans la petite cour « un laurier du Caucase, à
feuilles persistantes, dans lequel on pouvait se cacher ».
Des lieux multiples, des espaces infinis
« Un espace immense dans lequel nous pouvions librement
circuler, avec certaines limites bien sûr... ». La mare, « où nous pratiquions la pêche
au pain accroché au bout d’un fil nylon, pour attraper des carpes que nous
déposions dans une bassine, avant de les rejeter à l‘eau… Cette mare reste dans
ma mémoire comme un étang de 2 hectares, sans doute dix fois plus que sa
surface réelle ! ».
La forêt, avec ses ifs, faciles à grimper (mais il
était parfois difficile d’en redescendre…) et ses multiples variétés d’arbres,
sans doute plantés là par la famille Bégé un siècle plus tôt. « Les sous-bois étaient
très clairs, car débarrassés des branchages que nous utilisions pour construire
nos cabanes ».
« La piscine installée près de la garderie, le toboggan
en fer qui nous brûlait les cuisses, les feuilles regroupées en immenses tas,
que nous aimions détasser en y mettant des coups de pieds ou en nous roulant
dedans, les tours en vélo, sans aller trop loin… ».
« Nous pouvions à loisir nous disperser dans
les espaces naturels en toute liberté, et le bois à 50 mètres nous semblait au
bout du monde ».
« Le château, un peu mystérieux, où nous allions
de temps en temps, avec le grand salon, les cuisines… ».
Le monde animal
« Nous allions chaque jour
au poulailler [c’est ainsi que se dénomme à La Borde la ferme, le quartier des
animaux] pour nourrir les animaux, les grands poussant les poussettes des
petits : les chevaux [présents à La Borde pour l’équithérapie], les ânes, les cochons,
les poules, et aussi les paons très bruyants qui nous impressionnaient en
faisant la roue ».
Des rituels incontournables
« Le jus d’orange à 11 heures, accompagné d’un
quartier de pomme ».
Le goûter, « dont nous étions prévenus par la sonnerie de
la cloche, à 4 heures et demie, et qui constituait un grand moment de nos
journées. On nous confiait la responsabilité d’aller chercher le goûter au
château… Une vraie mission : nous ramenions le pain et le chocolat dans une
carriole, et il nous fallait affronter au retour les oies qui s’intéressaient
de près à notre précieuse cargaison, et "foutaient la trouille" à
quelques-uns qui revenaient en pleurs… ».
Pour certains, c’est le souvenir « d’un morceau de pain
avec quelques carrés de chocolat glissés dedans », pour d’autres celui « du chocolat chaud
accompagné d’une tartine de pain beurrée à laquelle nous rajoutions du sel ou
du sucre » ou de « la tablette de chocolat noir Poulain fondue sur son papier d’aluminium
à même la poêle et qui était ensuite répartie sur du pain... C’était un goûter
de fête ! ». Les repas se prenaient en général à la garderie, et parfois au
château.
« Et la galette des rois, dans laquelle madame Renault,
la boulangère, avait glissé de nombreuses fèves ».
Des activités multiples
« Quel plaisir nous avions à bricoler dans une pièce
de la serre, et quelle fierté de fabriquer des objets (utiles ou futiles…) et d’en
rapporter certains à la maison ! Nous avions carte blanche pour fabriquer tout
ce nous voulions avec des bouts de feutrine, de bois, de carton, de plastique,
guidés par la gardienne. De quoi développer très jeunes de multiples capacités et
un certain goût pour les arts plastiques ».
« Nous participions parfois à des ateliers avec
les patients, comme au poulailler, à la poterie ou pour préparer le spectacle
théâtral du 15 août ».
« Les ateliers dessins sur de gros blocs de présentation
de papier peint ».
« Certaines matinées, nous cuisinions des gâteaux
pour le goûter… J’ai encore en tête l’odeur sucrée, la chaleur du four, le
bruit des autres enfants qui jouaient autour de nous ».
« La cueillette de bouquets de fleurs, que nous
vendions 1 euro aux pensionnaires (tout comme nos dessins) pour pouvoir aller
boire un verre de Coca au bar, assises sur les hauts tabourets ».
« Nous allions parfois en cuisine, et le
cuisinier nous emmenait dans la cave où était stockée la nourriture : il nous
épluchait une carotte que nous mangions toute crue… ».
« Les jeux dans la « dodoche » dans le bois en
face de la garderie, un lieu insolite que cette vieille 2 CV toute rouillée,
avec des toiles d’araignées, habitée par des insectes, des petites souris…, un
monde mystérieux et flippant ».
« À la garderie, on ne cherchait pas à
anticiper. La plupart de ces activités n’étaient pas décidées ou programmées,
mais le plus souvent improvisées et imaginées entre nous, encadrées
discrètement par les gardiennes ». Et si décision il y avait, ce sont souvent les enfants
qui la prenaient, comme par exemple pour définir le parcours à emprunter pour
la sortie au poulailler à 11 h.
Les gardiennes se souviennent aussi de l’aide aux
devoirs pour certains.
À noter également que « les grands » avaient souvent
un rôle pédagogique (pour les aider, ou pour leur apprendre toutes sortes de choses)
auprès « des petits », ce qui a permis à certains de s’intéresser plus tard à l’éducation
des enfants…
Des réalisations extraordinaires
Nous n'en retiendrons que quelques-unes : « Une console de jeu et un
écran, le tout en carton, pour faire comme si, un igloo en briques de papier
journal compressé, un faux bison en carton… ».
Des jeux et des distractions de toutes sortes
« La garderie, c’était une quinzaine de gamins qui
se voyaient vivre "en bandes", façon "La guerre des
boutons" (3), avec les "grands" et les "petits", la
construction de cabanes, bien sûr, mais aussi des batailles de marrons, d’où nous
revenions pleins de bleus et de bosses ». « Je me souviens aussi des
après-midis entiers que nous passions dans la forêt qui fait face à la
garderie. Nous construisions des cabanes, nous grimpions aux arbres, nous récoltions
des petites baies rouges et nous jouions à cache-cache… ».
« Des promenades en calèche dans la campagne, ou
des sorties de plusieurs jours en Sologne dans la roulotte tirée par une
jument, guidée par un moniteur de la clinique, un véritable voyage au bout du monde,
avec ses pique-niques et ses dortoirs en pleine nature ».
« Des soirées à thème (médiéval, cow-boy, ...) avec
création de costumes, de chapeaux ou de casques, et des ateliers très créatifs,
qui nous ont appris à nous servir de nos dix doigts, et à construire des
scénarios en tout genre nous permettant de nous évader dans d’autres mondes et
de développer notre imagination ».
« Des feux de camp, sur lesquels nous faisions griller
des shamallows, avec les moniteurs et les parents, dont certains dormaient sur
place ».
« Des fêtes, comme celle de fin d’année
scolaire au mois de juin ».
« Les séjours à Saint-Jean-de-Monts ».
Et certains ont même profité de quelques séjours
organisés en hiver à la montagne, avec la joie d’obtenir son « flocon »,
premier stade de l’apprentissage du ski.
Comment ne pas évoquer aussi des activités (strictement
!) interdites, comme « aller se rouler dans la paille au poulailler, piquer des bonbons
dans les tiroirs (en crochetant parfois une serrure avec un trombone…), ou
faire des acrobaties sur le trampoline ». Tout comme une mémorable bataille à coups d’orties
dont un de nos témoins fut déclaré responsable car « c’est moi qui avais
appris aux copains comment les cueillir et les tenir sans se piquer ». Et nous tairons le souvenir de
l’essai d’une bouffée de cigarette, puisque l’intéressée n’a jamais recommencé
de sa vie !
Le sport également
Le séjour à la garderie permettait de s’initier à de
nombreux sports, comme le basket, le tennis ou le foot… C’est là aussi que
beaucoup d’enfants ont appris à nager : chaque mercredi, la camionnette J7 de
la clinique les emmenait à la piscine de Blois, quai Saint Jean, accompagnés
par les gardiennes et sous la houlette d’un maître-nageur. « Et lors du voyage
retour, souvenir délicieux, nous avions droit à un "Choco BN" ».
Les gardiennes
Peut-être pas des « anges gardiennes », mais plutôt
des « gardiennes-anges », très attachantes pour tous les enfants qui les ont côtoyées.
Elles sont nombreuses à s’être succédées à ce poste
depuis plus de 50 ans !... Les premières n’étaient pas qualifiées en tant que telles
ou diplômées, comme l’avait demandé Françoise Dolto, et se sont formées « sur
le tas », au contact des enfants (souvent une vingtaine environ) et grâce à
leurs capacités personnelles. Elles ont toutes laissé dans les mémoires des
souvenirs très touchants, contribuant à rendre ce lieu si attachant, chacune avec
ses particularités :
« La maman de tous, douce et moelleuse tout en
étant ferme quand il le fallait, ses bras, ses câlins, sa douceur », « elle se
faisait respecter, sans jamais élever la voix » pour l’une, et pour d’autres :
« Ses grands yeux bleus, discrète, un guide, une
accompagnatrice dans nos activités ».
« Elle sentait bon… À l’aise avec tous les âges,
avec tendresse. Dynamique, avec l’esprit de négociation ; elle aidait les
parents en difficulté dans l’éducation de leurs enfants ».
« Son énergie et sa bienveillance pour nous encadrer
dans les activités tout en nous laissant libres… ».
« On était peinards, avec des gardiennes pas sévères
mais qui savaient nous donner des limites, sans contraintes… ».
« Toutes très bienveillantes et gentilles ».
Belle mission pour ces gardiennes, qui pouvaient être
amenées à donner le biberon aux plus petits, tout en encadrant des pré-ados de
12 ans ou plus, qui avaient parfois des difficultés à redescendre sur terre,
perchés en haut des arbres !
Les pensionnaires de La Borde
Là aussi, les témoignages se complètent :
« Nous étions familiarisés avec le fait de les
côtoyer, sans réaliser que nous étions dans un environnement assez particulier…
et prestigieux du point de vue de la psychiatrie. Quelques-uns venaient parfois
donner un coup de main à la garderie pour certaines tâches ; certains nous
paraissaient bizarres, mais sans plus ».
« À l’époque, je ne faisais pas de différence entre
"eux" et "nous". Il y avait des pensionnaires impressionnants
dans leurs attitudes ou dans leurs cris, mais nous partagions le même terrain
de jeu. Nous les côtoyions directement au poulailler, à la poterie, à la
cuisine et sur les chemins ou dans les bois. Nous faisions le spectacle du 15
août ensemble ».
« Pas bizarres, pas dangereux, mais d’un autre
style ».
« Je me souviens d’une pensionnaire qui passait
beaucoup de temps avec nous et pouvait presque être considérée, par nos yeux d’enfants,
comme une gardienne. D’autres personnes nous effrayaient un peu, comme un
certain monsieur qui s’installait souvent près de la garderie avec une
couverture sur laquelle il installait tous ses jouets. Certaines règles étaient
en place et nous n’avions pas le droit de nous aventurer vers le château ; je
pense que les pensionnaires avaient également des consignes pour ne pas trop
venir vers la garderie... ».
« À vrai dire, les patients me faisaient un peu
peur... J’essayais toujours de garder de la distance les rares fois où ils se
promenaient jusqu’à la garderie (ou que nous allions nous-mêmes dans la
clinique) ».
« Parfois impressionnants, mais sans préjugés à
notre âge, et leur présence était expliquée par les gardiennes, qui nous
indiquaient la façon de nous comporter avec eux ».
« Les pensionnaires nous connaissaient et nombreux
sont ceux qui demandent encore de nos nouvelles, 20 ou 30 ans après ».
« Impressionnée parfois, mais la garderie était
notre monde protégé ».
Le temps de l’école
Certains (ou leurs parents) se souviennent que l’arrivée
en école primaire constituait un cap difficile à franchir : plus le droit de
grimper aux arbres, de circuler librement ou de faire ce que l’on veut. Des
rapports moins tendres, mais en contrepartie la joie de retrouver la garderie le
mercredi ou le week-end. « Les enfants demandaient la garderie, pas l’école ».
Liberté
S’il n’y avait qu’un mot à mettre en commun dans tous
les témoignages reçus, ce serait celui-là : liberté… de circuler (entre les
nombreux lieux de vie de la clinique), de s’exprimer, de faire, de découvrir et
de profiter de la nature, de rencontrer, d’imaginer, d’inventer…
Une expérience très riche, qui prend toute sa
valeur avec quelques années (ou décennies…) de recul
« Un endroit unique, fabuleux, bienveillant, protecteur
».
« Un autre monde qui ne correspondait pas à ce que
vivaient d’autres enfants de notre âge ».
« Où trouver une pareille richesse humaine ? ».
« Un excellent lieu pour découvrir le monde,
développer notre imagination, la création, la débrouillardise, le goût de l’aventure,
pour apprendre ou développer certaines capacités, pour accepter l’autre, une
belle école de la vie ».
« Cette expérience nous a certainement aidés à côtoyer
toutes sortes de personnes., L’une des plus belles expériences sociales de ma
vie ».
« Je ne serais pas la même personne sans cette
enfance passée à la garderie de la clinique de la Borde. Nous étions libres de
penser, de faire et de construire. Il me semble que c’est aussi le cadre
singulier d’une clinique psychiatrique qui m’a permis d’ouvrir mon esprit aux
différences de toute nature entre les êtres humains ».
« La proximité de la clinique et des
pensionnaires font que ce lieu permet un mélange et une acceptation de la
différence sans jugement. La Borde permettait, à mon époque de petite fille, de
se sentir libre et de grandir en construisant la tolérance ».
« Ce lieu dans l’enceinte de la clinique, même s’il
était distinct d’elle, portait en lui les mêmes valeurs humaines de respect de
l’autre, de responsabilité de chacun, d’ouverture sans jugement ».
« Je pense effectivement qu’il a influencé ma
vie familiale et sociale car il m’a permis de passer beaucoup de temps avec mon
frère, ainsi qu’avec d’autres enfants de tous âges, chose assez peu fréquente à
l’école où l’on côtoie principalement ses camarades du même niveau scolaire. Je
crois que la garderie m’a apporté la faculté d’aider spontanément les autres,
sans a priori ».
« Comme j’aimerais pourvoir recréer cette ambiance
de tranquillité et de bienveillance dans le monde déshumanisé où nous vivons souvent
aujourd’hui ! ».
« On ne peut imaginer mieux comme environnement
pour grandir en toute liberté dans un endroit un peu hors du commun ».
« Moi qui suis d’une nature timide, c’est un endroit
où j’ai pu m’épanouir, m’exprimer et faire évoluer mon imagination. J’y ai
aussi développé l’écoute et surtout la tolérance, qui sont des éléments qui m’ont
permis d’évoluer dans ma vie personnelle et professionnelle ».
« Aujourd’hui je suis maman d’un petit garçon de
2 ans et demi et j’aurais adoré pouvoir lui offrir un tel endroit pour s’épanouir,
car c’est un lieu qui a été très important pour moi ».
« L’apprentissage du partage et de la
rencontre, le "faire ensemble" ».
« Nous étions responsabilisés, au travers de tâches
confiées et du rôle "des grands" envers les "petits" ».
« Sentiment de liberté et de tranquillité, tout
en se sentant en sécurité et bien entouré sur le plan affectif ».
« Un lieu de tendresse, beaucoup d’amour ».
« La confiance, la tolérance, la considération
».
« Fille unique, j’ai en fait l’impression d’avoir
eu beaucoup de frères et soeurs ».
« La garderie a fortement marqué mon enfance
et mon attachement à la campagne solognote. Mon rapport à la folie et aux
bizarreries s’est construit pendant ces années-là aussi, j’en garde une grande
empathie pour les personnes étranges et/ou exclues socialement ; grandir près
des fous, ça marque… On a peu de préjugés quand on est enfant et je crois qu’on
arrive facilement à voir l’humanité des personnes qui souffrent et qui sont tourmentées
par leurs propres pensées. Et cela fait relativiser ses petits tracas quand on y
repense ».
Citons également cette réflexion d’une gamine de 4
ans, que nous a rapportée une gardienne, à sa maman qui s’étonnait des cris d’un
résident… : « C’est comme quand nous on fait des cauchemars la nuit, mais
lui c’est toute la journée qu’il fait des cauchemars ».
Et maintenant ?
Comme pour de multiples lieux que nous avons connus
il y a quelques décennies, certains seraient tentés de dire « Mais maintenant, ce n’est
plus comme avant » : eh bien si…, nous le confirmons ! Après avoir visité les
lieux, et rencontré les gardiennes actuelles et quelques enfants, nous avons pu
constater que tout ou presque fonctionne comme avant. Bien sûr les normes et
les règlements ont changé, mais bon nombre des phrases de ce texte écrites au
passé auraient pu l’être au présent ; la garderie a conservé sa philosophie :
autonomie de l’enfant…
P. L.
Merci aux « enfants devenus grands » :
Adrien, Anaëlle, Clarisse, Émile, Félix, Flore, Florian, Gabriel, Geoffrey, Jean,
Julie, Louis, Marina, Nitza, Sandrine, pour leurs chaleureux témoignages, ainsi
qu’aux membres du personnel de la clinique (actuels ou anciens, gardiennes, soignants
et autres) : Alain, Bernard, Claude (« Coda »), Elisabeth, Jacqueline (« Belin
»), Julie, Marie, Martine, Monique, Noëlle, aux parents et à quelques autres
qui resteront anonymes, qui nous ont permis d’évoquer tous ces souvenirs, ainsi
qu’à la direction de la Clinique de La Borde.
Voir aussi le film d’Anaëlle
Godard « Au jour le jour, à la nuit la nuit » - 2015
(1) Moniteurs : c’est ainsi qu’à La Borde on
désigne les membres du personnel soignant.
(2) Françoise Dolto (1908-1988) : pédiatre et
psychanalyste française qui s’est particulièrement intéressée à la psychanalyse
des enfants et à la diffusion des connaissances dans le domaine de l’éducation
des enfants (Wikipédia).
(3) « La Guerre des boutons » : film réalisé par
Yves Robert, sorti en 1962.
La Grenouille n°55 - Avril 2022
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