Dans le précédent épisode,
nous avons vu comment le duc d’Anjou, frère de Charles IX et futur Henri III,
devient roi de Pologne. Six mois plus tard, le décès de Charles IX le ramène en
France et Cheverny va à sa rencontre à Turin. Nous sommes en septembre 1574 et
c’est alors qu’ils sont en route pour Lyon
que Cheverny apprend la naissance de
sa fille Marguerite. Cheverny participe, alors que la Cour se trouve à Lyon, au
premier conseil du gouvernement du nouveau règne, seul avec la reine-mère
(Catherine de Médicis) et le roi.
Dans une période toujours très perturbée par une fin de guerre
civile qui n’en finit pas avec, notamment, des provinces comme le Languedoc et
la Provence qui sont très contestataires, la question qui préoccupe alors le plus
la nation est la descendance du roi. Pour cela il lui faut trouver une épouse :
beaucoup d’appelées, peu d’élues ! Elisabeth d’Angleterre, la princesse de
Condé, la soeur du roi de Suède, une princesse de Navarre, la fille du roi d’Espagne
sont toutes recalées… Et pour une bonne raison : le roi est amoureux de Louise de
Lorraine dite Mademoiselle de Vaudémont.
C’est donc le chancelier de Cheverny
qui est chargé de demander la main de la future reine. Nous sommes en février
1575. Ensuite les choses vont aller très vite. Le mariage est célébré et
consommé de suite pour, malheureusement, s’achever par une fausse couche et
Henri III, à son grand désespoir, n’aura finalement jamais d’héritier. Il n’en
est pas de même pour « Cheverny » dont la naissance de son fils Henri le 4
septembre 1575 vient agrandir la famille. Le roi et la reine sont parrain et
marraine. Le baptême est célébré en présence du duc de Navarre et d’Alençon,
ainsi que de tous les cardinaux, princes et seigneurs du royaume.
La notoriété de « Cheverny »
S’il n’est pas encore un second
Richelieu, il devient incontournable dans les prises de décisions du roi pour
la nation. C’est lui qui anticipe toutes les décisions et prépare les grands
évènements. Et un grand évènement se trame alors en secret : Monsieur, frère du
roi, prépare une révolte avec le duc de Navarre pour éliminer le roi, son
frère. À cet effet « Cheverny » se rend à Châtellerault où séjourne la reine
Mère et dont l’attitude est plutôt ambigüe dans ce complot à l’italienne ! Cheverny
est alors très convainquant, même si « souvent femme varie » ! Ce solognot des bords
de Loire reste droit dans ses bottes pour réconcilier les deux frères. Mais le
danger est partout et en particulier sur les routes. Or, en rentrant de
Châtellerault pour rejoindre Loches, Cheverny tombe sur un espion de Monsieur frère
qui se fait passer pour un magistrat de Poitiers en voyage. Cheverny, méfiant,
le questionne et comprend la ruse ; il anticipe le piège qu’on est en train de
vouloir lui tendre à Ligueil. Il fait mine de rebrousser chemin vers Loches avec
son escouade pour tromper l’adversaire qui n’y voit que du feu. Les coups bas
se succèdent de jour en jour, ce qui fatigue même Catherine de Médicis qui fait
repartir la troupe allemande commandée par le duc d’Alençon et l’on réconcilie
encore une fois les deux frères. Ironie du sort : c’est Cheverny qui se charge d’aller
chercher celui qui avait failli l’assassiner. La rencontre est très courtoise
entre les deux hommes car en ce temps là, les assassinés potentiels n’avaient
pas beaucoup de rancune, ni les assassins d’ailleurs ! Par dépit, le roi de
Navarre qui avait tant espéré devenir Lieutenant Général des Armées du Roi
cache sa désillusion en se retirant sur ses terres en Béarn jusqu’en 1589, soit
pendant 13 ans. Henri III souffle donc un peu.
Le roi convoque à Blois les États Généraux
Ce « pseudo parlement » a pour but d’apaiser un peu
toutes les divisions du royaume et donne l’apparence qu’un grand pays comme la
France est capable de se gérer en toute quiétude et fraternité. Une seule résolution
voit le jour après ces Etats Généraux : Henri III propose au roi de Navarre de
ne permettre en France que la religion catholique et il souhaite qu’il s’y
convertisse. Dans ces circonstances, c’est Cheverny qui prend son bâton de
pélerin pour recueillir les avis et les propositions des princes et des notables
afin de savoir si l’on doit continuer ou non à faire la guerre à l’église réformée
? Le duc de Nevers relate à ce sujet les conseils que Cheverny a prodigués au
roi après son retour :
- en premier : faire la paix pour faire rentrer de l’argent dans les caisses de l’État... au cas où il faudrait faire la guerre,
- en observant les autres pays, on constate que tous ceux qui sont en paix le doivent surtout au fait qu’il ne faut pas innover en matière de religion,
- la fréquence des guerres met sur la route des gens démunis qui s’habituent au pillage et à l’oisiveté, perdant ainsi peu à peu le goût pour leur vrai métier,
- les gouverneurs des villes doivent faire en sorte de punir les gens qui veulent changer de religion, les Huguenots étant les plus visés. Monsieur, frère du roi, devenu entretemps duc d’Anjou, va assiéger Issoire, ville prise par ces mêmes Huguenots. Le roi, lui; se repose chez sa mère, à Chenonceau.
Début janvier 1577, le roi récompense Cheverny en le faisant comte.
Ainsi, le domaine devient le comté de Cheverny.
Sources : « Le Chancelier de Cheverny » par le
comte Henri de Vibraye. Éditions Émile Hazan, Paris 1932
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