Jean Grateau : une vie bien remplie au service de ses concitoyens

Jean Grateau,
maire de Cour-Cheverny.
Jean Grateau a marqué de son empreinte une longue période de la vie locale de la commune au siècle dernier. Sa famille nous a transmis ce beau témoignage(1) à son sujet, nous permettant de garder une trace de la vie bien remplie de ce personnage que les anciens Courchois et Chevernois ont bien connu. 

Jean Grateau est né à Toumon-Saint-Martin (lndre) le 28 avril 1915. Son père était maréchalferrant et sa mère possédait un hôtel-restaurant dans cette commune. Jean était I’aîné d’une famille de trois enfants (avec son frère Marcel et sa soeur Suzanne). Après avoir obtenu son certificat d’études, il est élève au collège Saint- Stanislas à Poitiers, où il passe avec succès son baccalauréat. Puis il se rend à Tours pour étudier la médecine, à l’hôpital Bretonneau. 

Gabrielle et Jean Grateau.
Médecin à Cour-Cheverny...
Pendant la guerre de 1939-1945, à la suite d’un bombardement allemand sur Ie train Paris-Bordeaux à hauteur de Ménars, des blessés sont conduits à l’hôpital de Blois pour y recevoir les premiers soins ; mais devant le nombre élevé de victimes, les médecins font appel à leurs collègues de Tours. Jean Grateau, alors interne à l’hôpital Bretonneau et au terme de ses études, fait partie de l’équipe de renfort venue de Tours. C’est à cette occasion qu’il apprend qu’un poste de médecin est vacant à Cour-Cheverny. En octobre 1942, il s’installe à Cour-Cheverny, en remplacement du docteur Branchu, puis il se marie avec Gabrielle Joussaume, rencontrée lors de leurs études de médecine. Ils auront cinq enfants : Claudine, Marie-Christine, Jean- Claude, Jean-Mary (qui lui succéda au cabinet médical) et Jean-Yves. La salle Gabrielle (à l’ancienne gare), bien connue des Courchois car utilisée par plusieurs associations et par la municipalité de Cour-Cheverny, a été ainsi nommée en hommage à l’épouse de Jean Grateau, vice-présidente depuis 1964 de l’association « l’Amicale des Anciens » au sein de laquelle elle a créé « Le club du troisième âge » en 1977 et dont elle a été présidente jusqu’à son décès en 1981 (aujourd’hui « Loisirs et Détente »).
Finale régionale du parcours sportif
du Sapeur-Pompier à Romorantin
le 30 mai 1976

Un rôle très actif au service de sa commune...et sur un vaste territoire
De janvier 1943 à novembre 1944, il assure le service de santé des maquisards de Ia région Sud-Sologne. ll permet également à de nombreux hommes de se dérober au S.T.0. (Service du Travail Obligatoire) en Allemagne. Même pendant ces temps troublés, rien ne l’empêche de se rendre auprès de ses malades, que ce soit en moto ou à vélo (il y avait des restrictions de carburant), parfois au péril de sa vie, comme lorsqu’il se fait malencontreusement « canarder » par les forces alliées, sur le haut de la côte de Saint-Gervais. Sa clientèle s’étendait sur quatorze communes aux alentours (Mont-près-Chambord, Bracieux, Fougères-sur-Bièvre, les Montils, Bauzy, ...) ; pendant de nombreuses années, le secteur sud de Blois, jusqu’à Romorantin, ne comptait que trois médecins. Dévoué, au service des autres, il se déplaçait par tous les temps, à toute heure de la journée et de la nuit pour assister ceux qui avaient besoin de lui. ll était le « médecin de famille », médecin généraliste omnipraticien. En plus des traitements traditionnels (rhumes, grippes...), il pratiquait les accouchements à domicile, il soignait les dents dans son cabinet (il possédait des appareils dentaires et faisait des radiographies qu’il développait lui-même), il enlevait les amygdales, posait des plâtres… Lorsqu’il envoyait des malades aux cliniques blésoises pour des interventions nécessitant un appareillage spécifique, il assistait aux opérations et secondait les chirurgiens. 

Le 30 septembre 1944, il est nommé conseiller municipal par arrêté préfectoral. En avril 1945, il est réélu aux élections municipales ; il devient 2e adjoint et conserve cette fonction après les élections municipales d’octobre 1947. En 1949, il est nommé 1er adjoint. ll remplace M. Brunet à la tête de Ia municipalité après Ie décès de celui-ci, en août 1970(2). ll est ensuite confirmé dans cette charge au cours des élections suivantes en 1972 jusqu’en 1989 où il décide de se retirer de la vie municipale. Mais il restera, dans le privé, un conseiller très écouté de ses concitoyens.

Ce goût pour une carrière municipale relevait chez le docteur Grateau d’un intérêt très fort pour les autres, pour la vie associative. En 1944, c’est parce qu’il avait été sollicité par ses concitoyens qu’il avait accepté d’occuper une fonction dans le conseil municipal. ll faisait l’unanimité autour de lui et était respecté comme il respectait les autres, restant discret sur ses opinions, car il ne voulait influencer personne, que ce soit dans la vie municipale ou familiale.

Inauguration de la salle des fêtes de Cour-Cheverny
et de l'école maternelle en juin 1976, en présence
d'Alain Poher, président du Sénat,
et de Pierre Sudreau,député maire de Blois

D’humeur égale, il était toujours prêt à écouter et conseiller ceux qui le demandaient. Mais il détestait l’intolérance et la jalousie.
Pendant ses mandats successifs, il a réalisé avec le conseil municipal quelques grands projets qui lui tenaient à coeur : la construction de la salle des fêtes, la déviation de la route Blois Romorantin à hauteur de Cour- Cheverny, la maison de retraite, le groupe scolaire (inauguré par Alain Poher), la restauration de l’église, la réalisation du Centre de Secours, la station d’épuration.
Sa carrière municipale était intimement liée à la vie associative de Cour-Cheverny. Il était président de I’Amicale des Anciens, vice-président de la Lyre de Cheverny/Cour-Cheverny, du conseil d’administration de la maison de retraite, membre de I’UNC (Union Nationale des Combattants) - section 213 Cour-Cheverny depuis 1973, élu président en 1982 ; il était également médecin volontaire au Centre de Secours de Cour-Cheverny, avant d’être officiellement nommé à ce poste en novembre 1965 avec le grade de chef de bataillon (cf Nouvelle République, juillet 1988) ; il participait à la plupart des associations locales de sports et loisirs. Il était dirigeant du Comité régional de rugby. 

Un homme passionné dans de nombreux domaines
ll avait de nombreuses passions : féru d’aviation, il avait son brevet de pilote (il a été membre du conseil d’administration de I’Aéro-club du Loiret- Cher) ; il aimait Ie tir, la boule lyonnaise, la musique (en particulier les opérettes), la lecture ; il s’adonnait également à la peinture puisqu’il a réalisé quelques toiles, des aquarelles. ll prenait part à l’organisation de voyages (notamment pour l’Amicale des Anciens) et s’amusait à faire le guide. Dans ses journées bien remplies, il trouvait aussi Ie temps de s’occuper de son jardin, des fleurs, du potager.

Remise de la médaille de Chevalier de l'Ordre
du Mérite militaire à Jean Grateau en juillet 1970
Très actif dans le département…
Mais Jean Grateau n’était pas seulement une grande figure communale : il était également reconnu au niveau départemental et dans sa profession. La liste des fonctions qu’il a occupées parle d’elle-même : 
- médecin-chef du service départemental de secours et incendie, conseiller technique en matière de secours et protection civile ; 
- directeur honoraire du secourisme et membre du conseil départemental de la Croix-Rouge ;
- médecin au Tribunal des Pensions Militaires, exerçant également près de la CPAM de Loiret- Cher ;
- administrateur de la Mutuelle chirurgicale de Loir-et-Cher ;
- président du syndicat départemental et membre du Conseil départemental de l’Ordre des médecins ;
- médecin du centre médico-sportif de Blois.
Lieutenant-colonel, il a reçu bon nombre de distinctions pour les services qu’il a rendus : Chevalier de I’Ordre national du Mérite ; Croix du combattant volontaire, 1939-1945 ; Chevalier de I’Ordre du Mérite militaire ; médaille d’honneur « argent » avec rosette des sapeurs-pompiers ; médailles d’or et d’argent, départementale et communale ; médaille d’argent de la Gendarmerie nationale ; médaille d’argent de la Jeunesse et des sports ; ... (cf. La Voix du Combattant – n°1610 décembre 1995).

Le souvenir d’un homme de coeur
Mais la plupart de ceux qui ont connu Jean Grateau ont leurs propres souvenirs : quand il a guéri, quand il a aidé à la naissance d’un enfant, quand il était présent pour soutenir dans les moments difficiles. Les habitants de Cheverny et Cour-Cheverny se souviennent de l’été 1995 où ils l’ont vu inaugurer le four à pain, puis participer aux fêtes locales ou se promener dans ce village qu’il aimait tant. Le docteur Jean Grateau était quelqu’un de reconnaissant : toute sa vie, il a su remercier ceux qui lui ont appris et qui l’ont guidé. En 1988, lorsqu’il reçut la médaille d’or des collectivités locales et territoriales, il associa à l’honneur qui lui était fait tous ceux et celles qui avaient contribué au déroulement de sa carrière : ses parents dont il évoqua les sacrifices pour lui donner sa situation, son épouse, ses maîtres de la « primaire » à l’université, avec une pensée particulière pour « l’instituteur de son enfance qui lui enseigna si fortement morale et instruction civique » (cf . Nouvelle République, juillet 1988).
Jean Grateau s’est éteint le 16 octobre 1995, et c’est sur une pensée qui lui était chère que nous terminons cet hommage : « Dans la vie, ce qui compte, c’est de donner même quand on n’a pas tout ». 

Merci à Josiane et Jean-Claude Grateau de nous avoir transmis cet éloquent témoignage. 

P. L.

 (1) Ce témoignage, déjà publié dans le n° 3 de la revue « Le Petit Journal de l’Office de Tourisme de Cheverny et Cour-Cheverny » en mars 1996, a été légèrement actualisé pour la présente publication.

(2) Voir La Grenouille n°52 - page 22 « Des rues et des hommes ».  

Pose de la plaque du square Flandres Dunkerque, le 16 mars 1980, près de l’ancienne gare, baptisé ainsi pour perpétuer le souvenir du sacrifice des combattants de cette bataille de la guerre de 39-45.


La Grenouille n°53 - octobre 2021

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Merci de nous donner votre avis sur cet article, de nous transmettre un complément d'information ou de nous suggérer une correction à y apporter